Après l'échec des européennes de 1994, Michel Rocard écrivait : « dans parti socialiste, il y a parti et socialiste, or chacun de ces termes doit aujourd'hui être reconstruit. Le nom même du socialisme s'est forgé dans une conception du monde tout entière basée sur des rapports de production, sur des rapports de classe qui ont cessé d'être les seuls fondements de l'action politique. Etre fidèle aujourd'hui c'est prendre acte de ce fait.
Mais que dire du parti lui-même ? Qui peut croire qu'il pourra demeurer une société close attachée à ses rites, pratiquant les querelles de chapelles ou les luttes de courant et prétendant offrir à l'extérieur un discours monolithique par rapport auquel tout désaccord est un drame, toute déviation un sacrilège, et n'acceptant d'alliés que dans la soumission?
Ce dont nous avons besoin, c'est un vaste mouvement ouvert et moderne, extraverti, riche de sa diversité et même l'encourageant. Un mouvement qui fédère tous ceux qui partagent les mêmes valeurs de solidarité, le même objectif de transformation.
Ce mouvement s'étendra à tout ce que l'écologie compte de réformateurs, tout ce que le centrisme compte de fidèles à une tradition sociale, tout ce que le communisme compte de véritablement rénovateur, et à tout ce que les droits de l'homme comptent aujourd'hui de militants actifs et généreux. »
Etonnant… ? Tout était déjà dit en 1994. Depuis le PS n'a pas su trouver la synthèse entre son projet social historique et le modèle de société écologique à venir. Il n’arrive pas à sortir de la social-démocratie pour la social-écologie en tant que projet de société et alternatif au capitalisme. Il n'a pas su parler à la fois aux classes moyennes et aux couches populaires. Il s'est isolé dans l'entre soi et les logiques de courant, il a tourné le dos à 50% de ses militants. Il a trop peu parlé d'Europe et de mondialisation. Il n'a pas su incarner l’Europe comme Daniel Cohn Bendit ou Eva Joly, franco-allemand, franco-norvégienne, icônes de l'engagement, authentiques citoyens européens...
Et ce n'est pas un retour au "centralisme démocratique" qui va nous faire progresser, ni le poids des barons de province et des patrons locaux qui ne pensent qu’a la répartition des postes. Au contraire, nous avons besoin d’une organisation ouverte sur la société civile, plus décentralisée, plus participative, d’adhésions à bas prix, de plus de place pour la jeunesse et les femmes, de plus de participation pour construire notre projet, des primaires ouvertes pour la présidentielle, une réforme du militantisme, de la solidarité entre socialistes, un débat sur les alliances loin de tout dogmatisme…
Je rêve que les gens ne m'interpellent plus sur la situation du PS, ne me parlent plus de nos dirigeants, mais que l’on discute sur les modalités de la victoire de la gauche dans notre pays.